PLFSS 2024 : la prévention des addictions oubliée ?
Les drogues légales coûtent 258 milliards d’euros annuels à la société, mais le Gouvernement les omet sciemment du débat budgétaire. Addictions France appelle les parlementaires à voter avec pragmatisme et solidarité pour la santé de la population.
Alcool, tabac, jeu d’argent : des coûts pour les plus vulnérables
Les lobbies de l’alcool, des jeux d’argent et des buralistes mettent en avant un argument très plaisant pour les décideurs : leur contribution aux recettes de l’Etat grâce à leurs produits, ainsi que leur participation supposée à la construction de lien social.
Or une récente étude de l’économiste Pierre Kopp rappelle que le tabac et l’alcool, avec leur coût social s’élevant respectivement à 156 milliards et 102 milliards d’euros annuels, coûtent plus aux contribuables qu’ils ne rapportent. Quant aux jeux d’argent, leurs conséquences sont palpables au sein des populations précaires et jeunes.
Rappelons, par ailleurs, que les populations vulnérables subissent le plus de conséquences face à l’addiction.
La fiscalité : un outil de prévention, une contribution au soin
Pour rappel :
- Le tabac et l’alcool représentent les 1ères causes de cancer évitables, avant la malbouffe ;
- 22% des Français dépassent les repères de consommation d’alcool à moindre risque ;
- 23% des Français pensent que boire un peu de vin est meilleur pour la santé que ne pas boire, lorsque la science démontre tout l’inverse ;
- Une unité d’alcool contenue dans un spiritueux est 60 fois plus taxée qu’une unité d’alcool contenue dans du vin, en raison d’une moindre taxation du vin par rapport aux autres alcools.
Addictions France propose des mesures fiscales afin de mettre les entreprises à contribution pour le soin et la prévention des addictions qu’elles engendrent. Ces mesures visent aussi à agir sur les prix qui constituent un outil indispensable pour réduire les risques et les dommages. En effet, différentes études sur l’élasticité-prix de l’alcool (l’évolution de la demande en fonction du prix) démontrent que les jeunes et les consommateurs excessifs sont sensibles aux prix des boissons alcooliques. L’association propose aux parlementaires de :
✅ Dégager des financements au profit de campagnes de prévention indépendantes sur les risques de l’alcool et des paris sportifs à l’aube des futures compétitions sportives ;
✅ Instaurer une taxe sur les publicités en faveur de l’alcool et des jeux d’argent et de hasard, allouée aux caisses de la Sécurité sociale, dans une logique de « pollueur payeur » appliquée aux problématiques de santé ;
✅ Déplafonner les taxes sur l’alcool pour les indexer à l’inflation, et les harmoniser pour qu’elles financent le soin et la prévention. Ces mesures mettraient fin à l’exemption de certaines taxes pour les bières et le vin ;
✅ Taxer les bières industrielles sucrées, créées pour attirer les les plus jeunes ;
✅ Soutenir les amendements visant la mise en place d’un prix minimum par unité d’alcool
✅ Financer la revalorisation des salaires des « oubliés du Ségur », ces professionnels des secteurs sanitaire, social et médico-social exclus des différentes primes accordées par le Gouvernement, malgré leur rôle essentiel dans le fonctionnement des établissements.
Addictions France soutient aussi les amendements de l’Uniopss et de la Fédération Addiction, concernant la solidarité et l’accès aux soins et à la prévention, et ceux de l’Alliance contre le tabac en faveur d’une trajectoire fiscale ambitieuse sur le tabagisme.
Aller plus loin que le PLFSS
Après l’annulation de campagnes de prévention par le Gouvernement, la tenue d’une campagne ambiguë et critiquée sur l’alcool, une répression des consommateurs toujours plus affirmée, Addictions France appelle à un sursaut en faveur d’une réelle politique de prévention des addictions.
Après les discussions budgétaires, Addictions France invite ainsi le ministère de la Santé, le ministère de l’Economie et les parlementaires à :
- Mettre en place un prix minimum par unité d’alcool, car si agir sur les taxes est un premier pas, le prix minimum est d’autant plus efficace pour réduire les dommages de la consommation excessive
- Agir sur le marketing de l’alcool et des jeux d’argent
- Ouvrir un débat sur la légalisation encadrée du cannabis
- Sécuriser le financement des actions de prévention des associations.